Les chroniques de la rue.

La rue. Le bus. La fac. Il y a toujours un endroit où l'on trouve des histoires à raconter, où l'on surprend des inconnus parler et où l'on y trouve les situations les plus absurdes. Depuis quelques temps, j'aime inventer des histoires en fonction des gens que je croise. Sur de vrais propos que je peux entendre, voici donc mes histoires.

Aujourd'hui, je me suis promenée et j'ai surpris une conversation entre Léa, 14 ans et Mélissa 13 ans et demi. Vêtues de leur sac imitation Vanessa Bruno, qui, soit dit en passant, avait été acheté 5 euros sur le marché, elles papotaient tout en mangeant leurs beignets au sucre. Léa, alors qu'elle discutait de la " meuf" qui voulait la tuer pour je ne sais quelle raison, prit son beignet à pleine main et le fourra dans sa bouche. Elle dit d'un air étonné, tout en regardant ses mains : " Putain j'ai les mains toutes grasses ! " puis elle se tourna vers Mélissa et continua "en tout cas ce soir je mange pas, j'ai mangé un beignet au goûter !". Il faut croire que Léa suivait un régime stricte depuis que Lucas lui avait avoué préférer les filles minces qui avaient ce petit écart si mignon entre les cuisses. Mélissa quant à elle, la regardait bouche bée, tout en avalant ses moindres paroles. Cette dernière avait beaucoup d'admiration pour son amie et ne le cachait pas. Elle était l'ombre de Léa et faisait en sorte de la suivre partout pour ne jamais la perdre. Léa, après quelques remontées de mèches, dit enfin : " Mélissa, j'ai trop envie d'un café !". Les deux amies décidèrent donc de s'arrêter au prochain arrêt. Elles prirent leurs sacs sur les épaules, firent claquer leurs petits talons, et s'en allèrent.

Lorsqu'elles sont sorties, je me suis tournée vers le siège le plus proche de moi. Il y avait un jeune homme installé à cette place, le téléphone accroché à l'oreille : François. Sa mère était à l'autre bout du fil : " J'ai fait les soldes ! J'ai acheté un parapluie, et pas de la merde hein, un bon parapluie, un pyjama et trois paires de chaussures !" Je me suis attardée quelques instants sur sa tenue vestimentaire. Il portait un long manteau noir accompagné de chaussures en cuir vernies et d'une petite cravate du plus bel effet. Je reconnus tout de suite le look si stéréotypé et pourtant répandu d'un étudiant en droit. J'ai pu aussi voir son téléphone : un iPhone 5S, dernier cri chez les futurs avocats. Il expliquait à sa chère mère, qui était tellement fière de son fils, que son copain Donatien avait acheté un costume cravate à plus de 1000 euros. Il n'avait pourtant pas l'air étonné. Il continua et dériva sur un autre sujet : son orientation. Il dit à sa mère, sur un ton empli de fierté à la limite du snobisme : " je vais aller passer un entretien d'embauche à Montpellier, et je pense même me prendre un appart vue mer avec la plage et tout, il va faire meilleur qu'en Bretagne, ça c'est sur !". Malheureusement, François s'arrêta au prochain arrêt. Il rangea le téléphone dans sa poche, prit ses sacs Jules et Célio et disparut.